Baboo disparaîtra, l’esprit reste (Edition 2011-15)

Dominique Sudan à propos de Darwin Airline

Si Baboo en est malheureusement arrivé là, c’est uniquement en raison d’une évidente folie des grandeurs d’un management surdimensionné, à l’ego qui l’était tout autant. Le résultat est là: la sympathique compagnie régionale qui avait tout misé sur la qualité de service ne sera plus qu’un souvenir dans quelques mois, sa raison sociale n’étant maintenue par Darwin Airline que durant une phase transitoire.

Née sur le papier en 2003, Darwin a emprunté un autre chemin depuis le lancement de ses opérations, une année plus tard. Consciente des limites de son marché naturel, la compagnie tessinoise est demeurée fidèle à un développement pas à pas, tout en douceur. Jamais elle n’aurait ouvert de destinations sans être convaincue du potentiel réel, jamais elle n’aurait opté pour de beaux jets parmi les plus gourmands du marché, jamais elle n’aurait gonflé artificiellement ses effectifs en raison, précisément, d’un développement de flotte et de réseau sans vrai cap.

Aujourd’hui, Baboo peut remercier le ciel d’avoir trouvé une oreille attentive au Tessin: même si le prix de la transaction ne sera pas dévoilé, Darwin a «sauvé» plus de soixante places de travail et repris une partie des lignes ainsi que deux turboprops. Mieux, elle ouvre à Genève une nouvelle base opérationnelle qui lui offre de belles perspectives de développement et résout le problème de croissance créé par les limites natu-relles de Lugano. Si la marque Baboo est appelée à disparaître, l’esprit et la philosophie demeureront. Au total, la nouvelle Darwin Airline desservira plus de vingt destinations et entend doubler en moins de deux ans le nombre de passagers et le chiffre d’affaires. 

Pour réussir son pari, la compagnie tessinoise devra impérativement entrer dans le jeu des alliances commerciales. Car, sur l’ensemble de l’année, les opérations actuelles ne suivraient pas l’important développement de la flotte en raison du caractère saisonnier de nombreuses destinations.

Déjà liée à Alitalia par un partage de code portant sur plusieurs destinations de la péninsule, elle ne saurait se contenter de ce seul accord. Dans la logique de sa collaboration étroite avec Swiss sur l’axe Lugano–Zurich – Darwin vole sous la forme de wet-lease pour alimenter le hub de Zurich –, Darwin se rapprochera sans nul doute de Swiss à Genève. Plusieurs lignes sont susceptibles d’alimenter dans les deux sens les appareils de Darwin positionnés à Genève et de mieux répartir les flux de passagers entre les deux principales plates-formes helvétiques de Swiss. Frapper à la porte d’autres compagnies étrangères dont le seul but est l’alimentation de leur propre hub n’offrirait pas cette garantie.