«L’Asie en général reste un continent très sûr» (Edition 2015-35)

Après l’attentat de Bangkok, le point avec Jean-Michel Romon, Managing Director de la DMC asiatique.

Après Bangkok, vous attendez-vous à un recul sur la Thaïlande?

Sur le moment oui, mais sur le moyen terme je ne pense pas. Il faut être conscient que cet événement est dramatique; mais aujourd’hui, où pouvons-nous nous rendre en toute sécurité? De New York à Bali, de Bangkok à Tunis, le monde a changé en termes de sécurité. L’information est très rapide, mais évolue très vite. Dans deux semaines, Bangkok sera oubliée et l’on parlera d’autres choses. C’est la simple réalité des choses. 

Conseiller de ne pas se rendre à Bangkok est à mon avis une erreur. La Thaïlande et l’Asie en général restent des destinations très sûres. Cela me fait sourire lorsque je lis les communiqués des ambassades européennes. 

 

Phoenix est actif dans toute l’Asie du Sud-Est. Comment expliquez-vous le très net recul du Vietnam?

Plusieurs facteurs tendent à l’expliquer. La mode: les gens tournent, une année c’est l’Afrique, ensuite les USA et l’Amérique du Sud avant un retour sur l’Asie et le Vietnam. Les prix: le Vietnam a éprouvé beaucoup de difficulté, comme la Birmanie il y a deux ans, à maintenir des prix réalistes. La concurrence fait que les prix sont redevenus attractifs. Les nouveautés: le Vietnam a mis long-temps à comprendre que le pays devait jouer une carte régionale. Vietnam Airlines, en particulier, a réussi à ouvrir des lignes sur le Laos et le Cambodge. Le
Vietnam ne se vend plus du nord au sud, mais fait partie de la découverte com-plète de la région. Il y a 12 ans, il fallait un jour pour aller à Halong, un pour visiter et un jour pour en revenir.

Aujourd’hui, on est sur place en trois heures. D’aucuns le font même en une journée!

La communication: le gouvernement vietnamien est mauvais en communication, nous n’avons pas de support comme en Thaïlande ou en Malaysia. Le gouvernement réalise seulement maintenant combien le tourisme est important. Il suffit de se rendre sur les salons comme l’ITB Berlin ou le WTM London: le stand du Vietnam est toujours le plus mauvais! Mais la supression des visas est une très bonne chose et pourrait inverser la tendance. 

Pour ce qui est de la clientèle suisse et européenne, peut-on parler d’un chamboulement au sein des destinations choisies en Asie?

Chamboulement je ne le pense pas, mais évolution sans aucun doute. On oublie souvent de prendre en considération l’ASEAN, qui correspond aux débuts de l’Europe. Tous ces pays étaient en guerre il y a encore 40 ans. L’Europe a vu le jour au début des années 90, soit 50 ans après la guerre. L’ASEAN la rejoint lentement. 

On passe aujourd’hui la frontière du Vietnam au Cambodge en deux minutes. Idem au Laos et en Thaïlande. Même la Birmanie a ouvert la Asian Highway 1, de Mae Sot à Hpa-An. On peut y faire des circuits de Chiang Mai à Yangon par la route. Alors imaginons l’évolution dans 10 ans ou 20 ans! Dans les années 90, on visitait un pays; les communications étaient nulles. Aujourd’hui, tout est connec-té. On visite différemment et plus vite. 

 

La forme des séjours a-t-elle changé?

La clientèle européenne recherche du dépaysement, de la culture et un peu d’aventure. Souvent les clients sont déçus: oui, 50% des Birmans et 95% des Vietnamiens ont un téléphone portable et sont connectés au monde. C’est pour cette raison que nous devons proposer des séjours orientés vers le classique et offrir des alternatives hors sentiers battus, peut-être un peu moins confortables, mais beaucoup plus dépaysantes. 

L’offre aérienne s’est développée très rapidement. Est-ce que cela peut durer ainsi?

Je pense que cela ne va pas s’arrêter. Partout, on essaie d’agrandir les aéroports. De quatre vols par jour, Ho-Chi-Minh-Ville en offre plus de 50 à ce jour. De huit vols à Yangon, on est passé à 30. Les Européens ne sont pas vraiment conscients de la vitesse du changement en Asie.

DS