Le Romand plus Suisse que l’Alémanique (Edition 2011-23)

Dominique Sudan à propos des achats transfrontaliers

Dans la branche des voyages, les différences structurelles sont une réalité. Dans les modes de consommation, elles le sont également. L’agressivité tarifaire de l’Allemagne, ses multiples discounters et le niveau historiquement bas de l’euro causent des dégâts collatéraux sur le marché alémanique des voyages, lequel voit cette année basculer un nombre toujours plus élevé de ventes vers des prestataires d’outre-Rhin. Cette nouvelle version de «Jeux sans frontières» n’existe pas en Suisse romande. 

En Suisse alémanique, TUI très actif a sonné la charge il y a plusieurs années avec ses prix en euros. Dans la foulée, le marché est presque saturé et l’offre pléthorique: les discounters ont suivi, notamment Aldi, Tchibo, ITS Coop ou Lidl Reisen; de grosses entreprises y commercialisent également leurs produits, par exemple Neckermann, Thomas Cook, Alltours ou encore Schauinsland Reisen. Et encore ne s’agit-il là que des prestataires qui sont officiellement actifs en Suisse alémanique.

En face, la Suisse romande reste l’élève modèle. Plus Suisse que l’Alémanique, le Romand consomme suisse, achète suisse et voue une fidélité exemplaire à son agence de voyages ou aux producteurs helvétiques. L’absence de produits français offrant des standards de qualité équivalents en est la raison principale. Centralisé à l’extrême, le marché français des voyages ne s’intéresse pas à la Suisse et la Suisse romande le lui rend bien. A cela s’ajoute un problème fort simple touchant à la mentalité des Romands: ceux-ci n’apprécient pas les hôtels-clubs franco-français moyen de gamme – on ne parle pas ici du Club qui a souvent été imité mais fort mal copié – et encore moins les groupes constitués où domine la clientèle française. Cela ne passe tout simplement pas et cela ne passera jamais.

A contrario, la plupart des petits TOs indépendants de Suisse romande sont actifs avec un certain succès de l’autre côté de la frontière. Face à la concurrence des Fram et autres TOs actifs sur le même segment, leurs atouts sont appréciés dans une région abritant des dizaines de milliers de travailleurs frontaliers: des produits de qualité, un service de qualité, un suivi de qualité, une offre aérienne de qualité. Au départ de Genève, un charter programmé à 14h20 ne décollera pas la nuit suivante à 02h40. Cette qualité de service et de produit mériterait d’être encore mieux mise en valeur par un démarchage encore plus assidu de la France voisine dont Genève est l’aéroport naturel. C’est aussi dans cette optique que le nouveau TTW Romandie de septembre prochain est étendu à la France voisine.