«Pour Air France-KLM, le tourisme n’est pas le parent pauvre» (Edition 2010-39)

Country Manager d’Air France-KLM pour la Suisse et le Liechtenstein, Sylvie Boulant constate avec bonheur que si le marché est de petite taille, son poids économique pèse lourd.
Vous avez pris la direction d’Air France-KLM en Suisse en avril dernier. Votre œil neuf est-il ravi ou inquiet de la situation économique puisque la haute contribution est un des points forts du groupe ?

C’est notre cœur de cible depuis longtemps. Les produits et services offerts par Air France portent à capter plus facilement une clientèle haute contribution et business tandis que KLM a toujours eu une vocation plutôt tourisme. Mais nous constatons que, grâce aux contrats sociétés, KLM devient un acteur business plus important. Le trend se confirme en Suisse où nous avons 65% de trafic d’affaires et 35% de tourisme. La Suisse est géographiquement un petit marché, mais le poids économique est bien plus que significatif avec de grosses multinationales très dynamiques et un magnifique tissu de PME/PMI particulièrement performantes, sans oublier les organisations internationales.

Disposez-vous d’une réelle liberté d’action alors que les dimensions de l’entreprise laissent penser que le «moule» est incontournable? 

Si des règles de groupe et une politique commune sont indispensables pour une entreprise de la taille d’Air France-KLM, nous adaptons le plus possible nos actions et notre politique aux besoins du marché et à la concurrence. Ma vision du marché suisse est qu’il y a donc encore des choses à faire. Notre équipe doit s’employer à rendre cet espace le plus performant possible. C’est tout le contraire de l’agitation dans un bocal. Outre la fidélisation, il existe un foyer de prospects chauds à capter. Nous y travaillons. Le programme BlueBiz, lancé en mai, est taillé sur mesure pour les PME. Nous avons lancé depuis quelques mois une campagne pour le développement de cette niche de marché. BlueBiz permet de répondre, sans les engager, aux besoins de ces entreprises qui visent des dépenses contrôlées pour leurs voyages. Elles y répondent très favorablement. 

Comment estimez-vous votre potentiel de développement?

Je dois avouer que l’ensemble du monde aérien en Suisse ressent cette reprise, ce n’est donc pas un scoop. Certes, l’année Iata a mal débuté en avril, mais nous avons pu rattraper à fin juillet. Pour Air France-KLM Suisse, le chiffre d’affaires est en hausse avec une progression à deux chiffres et nous avons une recette unitaire correcte qui satisfait aussi notre clientèle.

Les signaux sont également porteurs parce que nous agissons sur l’effet des synergies. J’en veux pour preuve la coopération avec Delta sur environ 20 marchés européens. La Suisse a été choisie comme marché prioritaire pour les synergies qui sont mises en place avec Alitalia. J’ajoute que, dans le cadre de l’implémentation de la joint venture Air France-KLM, Delta et Alitalia, nos clients Trade et Corporate bénéficient d’un contrat conjoint et d’un interlocuteur unique pour le suivi.

Lorsque le secteur du business pèse autant, cela ne pénalise-t-il pas l’activité touristique?

Je ne le crois pas. Le tourisme pèse moins lourd en termes de contribution, mais il est tout aussi important. Nous sommes présents et actifs sur différents salons et workshops comme ce fut le cas tout dernièrement avec Envol Asie en Suisse romande. Nos forces de vente Tourisme ne ménagent ni leur soutien ni leurs efforts. Koos de Wit en Suisse alémanique et Tessin comme Nora Cottely pour la Suisse romande animent leur réseau avec autant d’enthousiasme que de sens du devoir. J’ai beaucoup de chance de les avoir auprès de moi. Ils sillonnent la plupart du temps leur partie de Suisse et rentrent au bureau pour mettre en place toutes les actions nécessaires pour supporter leurs clients: events, workshops partenariats ou eductours.

Quelles sont vos relations avec les TOs?

Nous avons noué de très bonnes relations avec les TOs, pas seulement avec ceux qui vendent la France puisque nous ne faisons pas de différence sur les marchés. Au niveau affaires comme pour ce qui touche le tourisme, nous travaillons l’ensemble de notre réseau, avec toutes les combinaisons possibles pour la satisfaction de nos clients. Ils savent que nous ferons tout pour les aider, mais il ne s’agit pas d’un sens unique. Il existe un certain nombre de destinations que nous désirons pousser, je pense à des ouvertures de ligne par exemple.

L’image d’Air France est naturellement connue en Suisse romande mais plus floue en Suisse alémanique. Comment y remédier?

Là encore, l’efficacité passe par les synergies, l’anticipation et la réponse aux interrogations. Si le trait est commun, l’approche est différente. L’aura d’Air France n’est plus à démontrer en Suisse romande, l’image forte de KLM tire la croissance du groupe en Suisse alémanique. Nous devons tenir compte de ces sensibilités locales pour qu’au final, le groupe s’impose par la puissance de ses deux locomotives.

En décembre dernier, nous avons lancé une enquête de satisfaction et demandé aux agents de voyages et TOs suisses de s’exprimer sur nos produits et services. Cela a permis d’identifier trois points à améliorer: la connaissance du hub de CDG, le call center, la flexibilité tarifaire.

Quelles réponses ou quels changements y avez-vous apporté ?

Les agents restaient arrêtés sur une image ancienne de Paris-Charles de Gaulle. Nous y avons organisé le plus grand nombre de visites possibles. Ils ont pu constater qu’il s’agit d’un aéroport moderne avec un nombre de connexions élevé et que le transfert entre les terminaux est rapide et efficace. Pour ce qui est du call center, nous avons bâti un team bilingue dédié à la Suisse, beaucoup plus attentif et formé pour répondre aux exigences de notre clientèle. Enfin, la mise en place de la nouvelle offre européenne permet de répondre à la troisième attente. La classe Premium est adaptée aux besoins professionnels, avec zone d’enregistrement dédiée, filtres de sûreté plus nombreux et plus rapides à Roissy, file prioritaire à l’embarquement, hotline Premium. A bord, la cabine est située à l’avant, la restauration adaptée. On y distingue la Premium Eco pour la flexibilité et l’efficacité au meilleur prix et la Premium Affaires pour une clientèle privilégiant confort et confidentialité.

Le 12 décembre prochain, les liaisons entre Genève et Paris en TGV seront de plus courte durée. Quelles réponses apportez-vous pour contrer cette future concurrence?

Air France a accumulé une certaine expérience à ce sujet. Quand le temps de parcours du TGV est de quatre heures, ils ont 40% de parts de marché. Pour trois heures, c’est 50%, et 90% pour deux heures de trajet. Au départ de la Suisse, nous nous partagions le marché. Nous avons lancé une desserte entre Berne et Orly deux fois par jour en concurrence avec le train rapide. Avec notre offre adaptée, nous avons su gagner la confiance de la majorité des clients bernois.

Pour faire face à la concurrence du train à grande vitesse et aux compagnies low cost, Air France a décidé de revoir son produit court et moyen courrier, en offrant un service répondant aux nouvelles attentes des voyageurs, orientées vers plus de simplicité, de lisibilité et des tarifs plus abordables.

Le groupe Air France-KLM sera-t-il présent au TTW de Montreux ?

Naturellement! Notre présence auprès de la branche touristique à Montreux  n’a rien d’une nouveauté. Cette année, nous serons donc évidemment au TTW. Les représentants du groupe Air France-KLM auront beaucoup de plaisir à rencontrer les professionnels sur le stand de Skyteam.

Alain Bossu