Surcapacité en vue entre Genève et le Golfe (Edition 2016-13)

Abondance de biens risque fort de nuire

Entre le 1er juin et le 1er juillet de cette année, le nombre de sièges proposé par les trois «majors» du golfe Persique augmentera d’environ 65 pour cent à Genève. Pour un aéroport de la taille de Genève, qui ne bénéficie pas d’un important trafic de correspondance, cette croissance est énorme. Emirates avait annoncé la couleur il y a deux mois: elle passera à deux vols quotidiens sur Dubaï au début juin. Si Etihad Airways s’en tient pour l’instant à un vol par jour en Airbus A330-300, elle pourrait aussi mettre en place un appareil de plus grande capacité à Genève. De son côté, Qatar Airways augmentera fortement la capacité sur Doha en positionnant chaque jour un Boeing 787-8 Dreamliner à Genève en lieu et place de l’actuel Airbus A320.

Dans le cas d’Emirates, il y a fort à parier que le nouveau vol du soir cannibalise en partie celui de l’après-midi en raison d’un horaire plus favorable. De plus, Emirates sera, à quelques minutes près, en concurrence directe avec Etihad pour une offre finalement très proche: même stratégie de hub entre les aéroports voisins d’Abu Dhabi et Dubaï, même modèle commercial pour le réseau long-courrier au-delà du golfe Persique. Il en va de même chez Qatar Airways, qui décolle un peu plus tôt en soirée, mais développe, au final, la même stratégie que ses deux concurrents.

En termes de rentabilité, il serait fatal de s’engager dans une spirale tarifaire au départ de Genève. Mais avec la zone de chalandise de l’aéroport, il est fort probable que cela soit le cas. Sans actions tarifaires ciblées, absorber une telle capacité supplémentaire tiendra de la gageure. Le consommateur, certes, s’y retrouvera, mais le gâteau à se partager n’est, de très loin, pas aussi grand que la capacité qui sera offerte à Genève.

Genève, en fait, occupe la même place que d’autres aéroports sur l’échiquier européen des compagnies du Golfe dont la stratégie globale consiste à gagner des parts de marché en enrichissant massivement l’offre. Dans ce cas de figure, abondance de biens risque fort de nuire. Or, l’approche de l’aéroport a toujours été de privilégier sur la durée le développement de nouvelles routes et d’enrichir le choix proposé aux clients. Là, les airlines du Golfe se lancent dans une course à la capacité.

Dominique Sudan