André Schneider: «Un optimisme prudent est nécessaire»

Retour à un résultat positif pour Genève Aéroport durant l’année 2022, marquée par une forte reprise des activités.
©Genève Aéroport

«2022 restera comme une année particulière dans l’histoire du monde aérien. Après le choc des années de crise 2020 et 2021 liée à la pandémie, tous les acteurs de l’aviation, aéroports, compagnies aériennes, entités au service du voyage, ont assisté l’an dernier à une montée en flèche spectaculaire du trafic passagers. Pour Genève Aéroport, dès le mois de février et la levée des restrictions de voyage, la reprise a été forte. Elle s’est poursuivie durant tout l’été et est demeurée très soutenue par la suite. Une vague de fond, prolongée en dépit des chocs géopolitiques, guerre en Ukraine notamment, et de la détérioration de la situation macroéconomique. Cette reprise a été nourrie par la demande des passagers pour visiter familles et amis, pour changer d’horizons et pour tisser de nouvelles relations. Tous ont exercé leur liberté retrouvée de voyager», commente dans le rapport annuel 2022 André Schneider, Directeur général.

Schneider_André, DG Genève Aéroport
André Schneider.

 

«Après cela, au moins deux grandes satisfactions nous habitent. En premier, être parvenu à répondre à ce défi. Dans un contexte particulièrement difficile – contrôle aérien européen et grands hubs en sous-capacité, tensions sociales, aléas météorologiques – Genève Aéroport et ses partenaires de la plate-forme ont su répondre, sans perturbations majeures, à ces volumes d’activités, notamment par le choix stratégique d’avoir gardé la quasi-totalité des collaborateurs pendant la crise grâce aux indemnités allouées pour les mesures de réduction du temps de travail (RHT). En second, avoir retrouvé les chiffres noirs de manière significative et pouvoir ainsi engager un processus de désendettement de Genève Aéroport», poursuit le Directeur général.

Retour dans les chiffres noirs

En 2022, Genève Aéroport a enregistré un bénéfice de CHF 61,8 millions avant rétrocession à l’Etat de Genève et de CHF 46,3 millions après rétrocession. Sous l’effet conjoint de la maîtrise stricte des coûts d’exploitation et de la hausse des redevances aéronautiques, Genève Aéroport améliore sa profitabilité. Au plus fort de la crise sanitaire, l’entreprise avait accusé une perte cumulée de CHF 218,4 millions pour 2020 et 2021.

Sous l’effet conjoint de la maîtrise stricte des coûts d’exploitation et de la hausse des redevances aéronautiques, Genève Aéroport améliore sa profitabilité. La marge sur EBITDA progresse de 5,7 points par rapport à 2019. Le pic de la dette est passé et Genève Aéroport entame dès 2022 son processus de désendettement, conformément à la stratégie approuvée par le Conseil d’administration. La dette, nette des liquidités et des placements, diminue de CHF 88 millions pour s’établir à 685 millions de francs à fin 2022 contre 773 millions au pic de la dette à fin 2021.

L’aéroport est retourné sur les marchés obligataires avant la remontée des taux d’intérêt pour préfinancer une partie du remboursement de l’emprunt obligataire de CHF 300 millions émis lors de la crise de Covid-19 et dont l’échéance est prévue en mai 2023. Dans cette perspective, un nouvel emprunt de CHF 100 millions a été émis avec succès en septembre 2022.

Par ailleurs, Genève Aéroport n’a pas utilisé la ligne de crédit de CHF 200 millions votée par le Grand Conseil genevois le 28 janvier 2022. A ce jour, l’Etat n’a pas eu besoin de débloquer ces fonds considérés et prévus comme un filet de sécurité utilisable uniquement en cas d’une éventuelle nouvelle détérioration drastique et prolongée du trafic. Compte tenu des perspectives de trafic et de l’activité observée sur les mois de janvier et février, l’année 2023 devrait confirmer la poursuite du désendettement entamé en 2022.

Progression des revenus

Portés par la reprise du trafic passagers, les revenus 2022 progressent de 102,4% par rapport à 2021 et atteignent CHF 423,1 millions. Pour mémoire, le chiffre d’affaires d’avant crise s’élevait à CHF 493,9 millions à fin 2019.

Les revenus aéronautiques augmentent de 130,7% par rapport à 2021. Cette progression est liée à l’augmentation du trafic et à l’effet de la hausse tarifaire de CHF 4,45 par passager sur une année pleine. L’augmentation des redevances passagers est intervenue en juillet 2021. Elle finance l’amortissement des lourds investissements réalisés ces dernières années pour adapter l’infrastructure, notamment la construction de la nouvelle Aile Est mise en service en décembre 2021.

Les recettes non aéronautiques (commerces, parkings, loyers, etc.) augmentent de 72,5%. Avec le retour des passagers, les recettes commerciales progressent de CHF 46 millions, soit une hausse de 151,1%. La plus forte reprise est observée au niveau des redevances liées à la restauration. Tous les points de vente ont pu à nouveau être ouverts au plus tard en février 2022 alors qu’ils avaient été totalement ou partiellement fermés en 2021. La part des recettes aéronautiques dans le total des produits de Genève Aéroport augmente. Elle représente 58,6% à fin 2022 quand elle était de 51,5% à fin 2021.

Les dépenses d’exploitation augmentent logiquement avec le retour de l’activité et atteignent CHF 264,7 millions à fin 2022. Les dépenses de fonctionnement progressent de CHF 20,1 millions de francs pour s’établir à CHF 119,3 millions (+20,3 % par rapport à 2021) et sont inférieures aux projections sous l’effet d’un suivi strict des dépenses opéré à tous les niveaux de l’entreprise. Les charges de personnel 2022 sont maîtrisées et augmentent de CHF 19,9 millions par rapport à 2021 en raison de la fin du système de réduction de l’horaire de travail (RHT).

Reprise du transport aérien

En 2022, Genève Aéroport a comptabilisé 14’085’280 passagers, soit 137,8% de plus qu’en 2021, mais 21,4% de moins qu’en 2019. Durant les douze derniers mois, le total des atterrissages et des décollages atteint 163’168 mouvements, soit 64,4% de plus qu’en 2021. Ce chiffre reste inférieur (-12,3%) aux 186’043 mouvements enregistrés en 2019. Dans le secteur de l’aviation d’affaires, les mouvements d’avions ont augmenté de 16% en 2022.

©Genève Aéroport

Autre élément intéressant de l’année 2022: un taux de remplissage supérieur et par conséquent un niveau de passagers par vol élevé. Avec 112 et 118 passagers par vols en moyenne en 2016 et 2017, le niveau était monté à 123 et 124 en 2018 et 2019. Il est retombé à 106 et 105 en 2020 et 2021 pour s’élever à 122 passagers par mouvements de vols lignes et charters en 2022.

L’activité du fret aérien affiche une croissance de 18,67% avec 70’566 tonnes traitées aidée par le retour des capacités sur les gros-porteurs et la conjoncture économique.

Easyjet et Swiss en tête

Avec le retour d’Air China en février 2023, Genève Aéroport retrouve la totalité de son réseau long-courrier d’avant crise – Air Mauritius suivra en octobre prochain. La desserte de Genève Aéroport, qui comptait 139 destinations en 2021, a progressé pour atteindre 146 destinations en 2022. En 2022, le «Top 5» des destinations par ville est composé de Londres, Paris, Porto, Lisbonne et Amsterdam.

Les parts de marché des dix premières compagnies aériennes pour l’année écoulée se répartissent ainsi: Easyjet (49,6%), Swiss (11,5%), British Airways (4,7%), Air France (3,9%), Iberia (2,9%), KLM (2,3%), TAP Air Portugal (2,1%), Turkish Airlines (2%), Lufthansa (1,9%) et Emirates (1,6%).

Singapour, destination privilégiée du Business Travel

En 2022, Genève Aéroport a lancé une vaste étude sur les voyages d’affaires auprès des multinationales, des organisations internationales et des associations faîtières de la région. Il en ressort en particulier une reprise des voyages d’affaires au deuxième semestre, une part limitée de voyages (20%) remplacée par des séances vidéos et une confirmation de l’importance du déplacement pour rencontrer physiquement les clients, développer de nouveaux prospects et participer aux grandes conférences.

Par ailleurs, cette enquête a mis en évidence les destinations long-courriers particulièrement souhaitées et privilégiées par les entreprises du bassin régional, soit largement en tête Singapour, suivie de Tokyo et Sao Paulo. Enfin, l’enquête a révélé la bonne image de l’aéroport et de la nouvelle Aile Est pour cette clientèle.

Une étape de stabilisation

«La partie n’est pas définitivement gagnée. Un optimisme prudent est nécessaire. L’industrie aérienne affronte encore moult défis: réductions structurelles des compagnies aériennes, retard de livraison d’avions, pénurie de main d’œuvre sur certains marchés, inflation généralisée, tensions géopolitiques, etc. À notre échelle d’aéroport, nous sommes entrés dans une étape de stabilisation. Nous devons poursuivre les investissements essentiels pour être un aéroport efficace, convivial, respectueux de l’environnement et bientôt complètement décarboné. Ce sera à court et moyen terme la prochaine mise en œuvre de l’installation tri-bagages (BLC), le chantier GeniLac qui permettra l’abandon des énergies fossiles ou encore le projet CAP 2030, soit la mise à niveau du terminal principal et la création d’une plate-forme multimodale entre bus, trains, véhicule privés et avions», conclut André Schneider. (DS)