«L’objectif de la France n’est pas d’attirer plus de visiteurs, mais d’offrir une expérience de meilleure qualité»

Rencontre avec Nathalie Delattre, ministre française du Tourisme.  
Nathalie Delattre: «Le tourisme de demain sera durable, local et respectueux de nos équilibres.» ©DW

Nathalie Delattre, ministre française du Tourisme, s’est récemment exprimée devant la presse professionnelle internationale au premier étage de la Tour Eiffel, dans le cadre de l’héritage des Jeux olympiques de Paris 2024.

Elle a également souligné la nécessité de réguler les flux touristiques pour mieux répartir les visiteurs sur l’année et sur l’ensemble du territoire. Elle défend une vision du tourisme durable, enracinée dans les territoires, tout en misant sur l’attractivité internationale. Elle a par ailleurs évoqué les perspectives d’accueil à l’horizon 2030.

«La France est la première destination touristique mondiale. Aujourd’hui, l’objectif n’est pas simplement de recevoir toujours plus de visiteurs, mais de mieux organiser leur venue et de répartir les flux sur l’année comme sur l’ensemble du territoire», a indiqué Nathalie Delattre.

La ministre veut rompre avec une logique de concentration sur Paris, le littoral et la montagne, au profit d’une valorisation de toutes les régions: «Nous avons des pépites en ruralité et une immense richesse dans le tourisme sportif, culturel, patrimonial, de bien-être.»

Pour encourager cette diversité d’accueil, le Gouvernement s’appuie sur un mécanisme décentralisé de régulation des meublés touristiques, confié aux maires. «Ce sont les élus locaux qui ont désormais la main. Certaines communes ont besoin de davantage de meublés pour renforcer leur offre; d’autres, comme Paris ou Saint-Malo, veulent limiter les conflits d’usage entre locations touristiques, logements permanents et saisonniers.»

La loi permet dorénavant aux maires de limiter la durée de mise en location à 90 jours par an dans certains quartiers. «C’est un système à plusieurs vitesses, au service de l’équilibre local. Et surtout, il sera accompagné de contrôles exercés par les municipalités.»

Une croissance forte pour l’été 2025

Dans le sillage des JO et en perspective de l’été 2025, les chiffres sont prometteurs. «Nous observons une augmentation de plus de 8% des réservations sur le premier trimestre de cette année», note la ministre. L’impact de la dynamique olympique se fait clairement sentir, tant auprès des clientèles lointaines que des voisins européens.

«Nous enregistrons une forte hausse des visiteurs transatlantiques: Américains, Brésiliens, Chinois. Mais nous menons aussi des campagnes ciblées vers les Belges, les Hollandais, les Anglais ou encore les Allemands. Les pays frontaliers sont essentiels pour dynamiser un tourisme européen de proximité, qui complète notre tourisme intérieur.» Et, à ce niveau, la Suisse est aux premières loges, tant en nombre de visites que de dépenses.

Parallèlement, le Gouvernement entend encourager les autochtones à voyager chez eux. «Il s’agit de permettre à nos concitoyens de découvrir leur propre pays et de mieux utiliser nos infrastructures touristiques. C’est un enjeu d’économie locale et de transition écologique.»

Gastronomie, œnotourisme et tourisme spirituel, une offre plurielle

«Il faut faire connaître l’ensemble des facettes du tourisme tricolore.» Nathalie Delattre insiste sur la diversité des expériences proposées: tourisme de santé, tourisme cultuel autour des lieux de pèlerinage, tourisme d’affaires, etc. «Sur toutes ces thématiques, nous avons des marges de progression et une capacité à démontrer l’excellence de notre hospitalité à la française.»

Parmi les axes forts, la ministre met en avant l’essor de l’œnotourisme. «Un secteur en pleine progression. En huit ans, plus 20 %, 12 millions de visiteurs et 33 millions d’actes d’achat ont été enregistrés. Notre gastronomie attire à elle seule un tiers des touristes étrangers.»

Et ce succès ne repose pas seulement sur les établissements étoilés. «Nous disposons d’une grande richesse de bistrots, d’auberges, de brasseries régionales, qui font la fierté de nos territoires. Cette diversité participe à notre attractivité.»

«Nous avons tiré les leçons de Paris 2024»

L’été dernier, la tenue des JO dans la capitale a suscité de l’enthousiasme… mais aussi des absences. «C’est vrai qu’avant tout grand événement, il y a des craintes liées à la saturation, aux difficultés de circulation, à l’accès aux commerces… Malgré nos efforts pour rassurer, beaucoup de Parisiens sont partis, comme chaque été. Certains regrettent aujourd’hui de ne pas être restés pour cet événement historique.»

Selon la ministre, cet effet d’appréhension est universel. «C’est une tendance que l’on observe ailleurs également. Mais maintenant que nous avons vu la ferveur extraordinaire suscitée par ces Jeux, je suis convaincue que, pour les JO de 2030 dans les Alpes françaises, nous ne commettrons pas la même erreur.»

La France entend capitaliser sur cette expérience pour renforcer son image de destination événementielle, mais aussi tirer parti des retombées dans tous les territoires. «Ce travail de fond, sur la marque France, nous le menons depuis longtemps. Il s’agit de montrer au monde la diversité et la qualité de notre offre, au-delà des clichés.»

Didier Walzer, Paris