Sonja Laborde: «Sauver la branche est plus avantageux que la laisser mourir!»

Travel Professional Association (TPA) a tenu son assemblée générale annuelle samedi à Fribourg, dans un contexte de crise majeure.
La présidente Sonja Laborde (devant) entourée de Dominique Ludi (membre sortant), Armin Leuppi (sortant), Florence Inäbnit (nouvelle élue), Christine Fournier, Alexandre Python, Edy Hofmann et Michel Ayer (président d'honneur) - manque Koni Koelbl. Photo: DS

Plus de 80 membres étaient réunis samedi au Domaine de Notre-Dame de la Route, à Villars-sur-Glâne, pour l’assemblée générale de TPA, fortement marquée par la crise sans précédent qu’a entraînée le Covid-19 pour la branche des voyages. En plantant le décor, la présidente Sonja Laborde est revenue sur la déconfiture de Thomas Cook qui avait entraîné certaines pertes pour quelques membres de TPA et porté un gros coup à l’image du secteur.

Deux dérives du système

«Thomas Cook a mis en lumière deux dérives d’un système auquel nous participons tous: non seulement la faiblesse des fonds de garantie qui saute aux yeux, mais aussi la faiblesse du tourisme de masse. Plus d’un milliard d’euros n’ont pas été payés aux divers prestataires et quelque 600’000 clients ont été bloqués à travers le monde. Et dans le contexte actuel de crise majeure, la perte pour la branche des voyages devrait se monter à CHF 570 millions d’ici à la fin de l’année 2020. Nous devons impérativement revoir notre modèle pour sortir de cette crise. Les trois fonds de garantie suisses sont tous logés à la même enseigne, avec AXA comme réassureur qui ne prend pas en charge les cas de pandémie. Si 30 à 40% des agences de voyages disparaissaient, les trois fonds de garantie feraient face à un très gros problème: le système tel qu’il est conçu s’effondrerait puisque la facture totale se monterait à quelque CHF 246 millions alors que les réserves à disposition des fonds de garantie n’atteignent que CHF 7 millions», a rappelé en ouverture la présidente de TPA.

Partie formelle sans surprise

Contraintes sanitaires obligent, le comité de TPA a dû s’adapter ces derniers mois, sans chômer. Son gros travail a été effectué par le biais de 18 séances via Zoom, qui bien entendu ne remplaceront jamais le contact direct. Dans le contexte actuel, deux professionnels ont fait par de leur intention de s’engager pour l’association: Florence Inäbnit (L’Esprit du Voyage, Fribourg) et Koni Koelbl (Travel-Solutions, Berne), lequel avait déjà siégé au comité en 2007/2008 et bénéficie de nombreux relais à Berne.

Dominique Ludi (Versoix Voyages) et Armin Leuppi (Raurica Travel, Kaiseraugst) ont donc décidé de se retirer après des années de bons et loyaux services au sein du comité et ont été acclamés par l’assemblée pour les services rendus. Quant aux deux nouveaux membres proposés à l’assemblée, ils ont été élus par acclamations. La présidente ainsi que les autres membres du comité ont aussi été réélus pour un nouveau mandat: Sonja Laborde, Edy Hofmann (Coco Travel, Grancia), Alexandre Pyton (Ad gentes, Genève) et Christine Fournier (secrétaire).

Les autres points à l’ordre du jour ont tous été approuvés (procès-verbal de la dernière assemblée, comptes 2019, reconduction de la fiduciaire et budget 2020/2021 – celui-ci est rouge foncé, un bilan intermédiaire étant impossible à établir aujourd’hui.

Gros travail de communication

Parmi les priorités absolues de TPA figure la communication vers l’extérieur et le repositionnement de l’association. «Notre fort engagement dans la communication commence enfin à être reconnu en Suisse alémanique. Mais le contexte décrit en préambule prouve que la branche est face à deux problématiques d’importance majeure: la révision urgente de la Loi sur les voyages à forfait (LVF), qui est totalement obsolète, et le repositionnement de la notion de fonds de garantie. Le travail accompli doit permettre de modifier au plus vite cette LVF, qui ne doit plus parler de forfait mais devenir une loi sur les voyages. Mais là aussi, comme pour le travail parlementaire qui a fait immensément défaut à la branche, nous sommes face à un immense déficit d’image», lance Sonja Laborde.

TPA mandate Furrer Hugi

La crise actuelle a poussé les Romands à s’unir et à parler d’une même voix. Dans un tel contexte, le maintien en vie des cinq Groupements d’agences de voyages romands a en aucun doute constitué un «plus», la Suisse alémanique ayant au contraire opté pour la dissolution de l’ensemble de ses anciens Groupements. Le «clan des sept» a ainsi pris forme, composé des cinq Groupements, de la Fédération suisse du voyage (FSV) représentée par son vice-président, Stéphane Jayet, et de TPA.

«Nous avons élaboré un document pour la FSV afin de soumettre des propositions au Seco. Nous étions convaincus dès le départ qu’une aide à fonds perdu serait très difficile à obtenir, car partir uniquement de cette idée ne suffit plus. Avec plusieurs agences de voyages alémaniques partageant finalement notre vision, nous avons aussi établi un plan de communication de 14 pages qui a été fraîchement reçu par nos amis zurichois, lesquels ont été mis devant le fait accompli. Comme rien ne bougeait à Zurich, nous avons décidé de mandater la société de communication de renom Furrer Hugi. Un deuxième fait accompli pour les Zurichois qui n’ont guère apprécié la démarche», explique Sonja Laborde.

Finalement, la proposition Furrer Hugi est retenue et commune à la FSV, STAR et TPA. Mais un tel mandat confié à une société aux puissants relais politiques n’est pas gratuit. «Nous avons bien entendu décidé de partager les frais à raison d’un tiers chacun, équilibre accepté par la FSV. En revanche, STAR a procédé à de savants calculs et a estimé que sa participation aux coûts se limitera à 13%. Autant dire que la FSV et TPA se partageront l’essentiel des frais liés au mandat de Furrer Hugi, comme ce fut d’ailleurs également le cas pour les honoraires  de l’avocate Sophie Winkler», ajoute Sonja Laborde.

La montagne accouche d’une souris

La présidente de TPA insiste aussi sur le fait que c’est grâce à Furrer Hugi qu’une rencontre a été possible avec la Conseillère fédérale Karin Keller-Sutter. Une rencontre qui a aussi abouti à la «décision» de jeudi dernier portant sur la prolongation du statu quo juridique (suspension des poursuite jusqu’à la fin de l’année). La montagne a en effet accouché d’une souris.

«Cas de rigueur» ou pas?

Toujours est-il que les associations réunies au sein de la Task Force Voyages ont tenté de faire entendre leur voix auprès de la Berne fédérale et préconisent des solutions fortes pour atténuer les conséquences du Covid 19 sur la branche des voyages. La classification en «cas de rigueur» en est le mur porteur pour ce qui est des APG pour tout entrepreneur indépendant, des évaluations d’indemnisations RHT, des prêts Covid 19 qu’un tiers des petites agences ont décidé de ne pas utiliser et, enfin, des coûts fixes en période d’absence de revenus.

«La session d’automne dont l’ordre du jour est établi ne devrait pas nous permettre de faire passer ce dossier, à moins que Furrer Hugi soit en mesure de faire pression sur qui de droit. Il faut aussi rappeler que le Conseil fédéral a levé la notion «d’état d’urgence» et que, dès lors, les décisions sont du ressort du Parlement, sauf pour les lois édictées durant la crise (c’est le cas du statu quo juridique). Si le Conseil fédéral nous déclare cas de rigueur, le dossier peut prendre une autre tournure. Dans tous les cas, le message aux parlementaires est clair: sauver la branche est plus avantageux que la laisser mourir», martèle Sonja Laborde.

Quatre workshops

L’assemblée 2020 de TPA a été suivie de quatre workshops traitant de thèmes actuels: l’aspect juridique portant sur la LVF et les remboursements a été développé par l’avocate Sophie Winkler; Florence Inäbnit et Wolfgang Boschung (Para Travel) se sont penchés sur le nouveau modèle de travail et la perception d’honoraires par toutes les agences lors de la première prise de contact avec le client; l’attitude des assurances a été l’affaire de Koni Koelbl alors que la fin des entreprises (SA, Sàrl ou Raison individuelle) a été débattue par Alexandre Python. TRAVEL INSIDE reviendra sur ces workshops dans sa prochaine édition.

(Dominique Sudan)