Le tourisme est-il anticyclique? (Edition 2009-03)

Dominique Sudan à propos de la santé de la branche

Dans un passé récent, l’industrie touristique a toujours relevé la
tête, aussi dramatiques que furent les circonstances. Cette capacité de
résistance est un fait avéré. Les exemples ne manquent pas, qui
témoignent de cette facilité déconcertante à tourner la page. Qu’il
s’agisse de faits de guerre ou de phénomènes naturels incontrôlables,
voire imprévisibles, le tourisme est souvent l’exception qui confirme
la règle.

Depuis l’automne dernier, le tableau devient chaque jour plus noir. La
crise financière mondiale n’épargne nullement la Suisse mais,
visiblement, le citoyen lambda préfère encore et toujours renoncer à
d’autres biens de consommation avant de revoir à la baisse son budget
vacances. Cette parenthèse annuelle, le Suisse continue de l’estimer vitale malgré les vents contraires.

Sans fin ni cesse, les médias peignent le diable sur la muraille depuis
l’automne dernier. En matière de vacances, le Suisse y demeure
insensible. Tel est le constat que l’on peut faire aujourd’hui en
analysant l’état des réservations des grands TOs et en prenant le pouls
de quelques agences de voyages indépendantes. D’ailleurs, le résultat
est identique en Suisse francophone comme en Suisse alémanique: les
Suisses voyageront cette année même si le mode de réservation est
marqué par des confirmations plus tardives qu’auparavant. A ce jour, on
n’observe pas de changement frappant dans l’approche du Suisse moyen:
les familles réservent, les dossiers sont d’un bon niveau et ce n’est
pas forcément les offres bon marché qui ont la cote dans les agences.

Toutefois, il convient de relativiser. Deux semaines seulement se sont
écoulées depuis le début de l’année et chacun sait désormais que tout
peut rapidement basculer, dans un sens comme dans l’autre. De plus, les
grands TOs ont mis cette année le paquet en termes de rotations
charters. Ces milliers de sièges, il faudra les remplir. Des
changements de programmation sont donc inévitables. Sans eux, les prix
devraient être tirés vers le bas avec tous les dangers que cela
représenterait pour la rentabilité des opérations.

D’un autre côté, le premier trimestre risque d’être relativement long
pour les producteurs dans la mesure où les vacances de Pâques ne
tombent qu’en avril. Et les relâches de février risquent aussi de
souffrir puisque les conditions d’enneigement sont meilleures que
jamais et pourraient inciter le Suisse moyen à rester au pays. Enfin,
le gros des réservations de l’été ne se fera que très tardivement,
précisément en raison du décalage des vacances de cette année 2009.

Ce n’est qu’après quelques mois qu’un vrai bilan intermédiaire pourra
être tiré. Aujourd’hui, l’élément le plus réjouissant reste que la
branche se porte bien et s’attend à un exercice pas aussi noir que
celui que d’aucuns prédisaient. C’est là l’essentiel: le tourisme
serait-il vraiment anticyclique? Ou plutôt antidépressif?